Littérature française

Cécile Ladjali

Illettré

Chronique de Aurélie Janssens

Librairie Page et Plume (Limoges)

Ils seraient environ 7 à 9%, selon les statistiques, à ne pouvoir lire cet article, un courrier, un panneau, à ne pouvoir déchiffrer le monde qui les entoure. C’est le cas de Léo, personnage principal du roman de Cécile Ladjali, Illettré. Au moment où, comme tous les enfants de 6 ans, Léo apprend à lire, ses parents, endettés, fuient le Fisc et l’abandonne à sa grand-mère analphabète. Ce traumatisme se mêle intrinsèquement à l’apprentissage, qui devient dès lors un exercice douloureux. Laissant « des continents entiers hors du sens, hors de lui », il tente de faire illusion jusqu’au moment de quitter l’école pour l’usine. Il ruse, s’adapte à un monde où les mots sont autant de « fauves » qu’il lui faut dompter. Cependant, l’illusion ne peut rien face à la notice d’une machine, qui, indéchiffrable, lui fait perdre deux doigts. Cet accident et sa rencontre avec sa voisine infirmière déclenchent chez Léo une envie de ne plus simplement « flotter parmi les signes ». Par l’apprentissage de la lecture, il espère avoir accès à ces « mondes contre-factuels, futurs et conditionnels », mais aussi au cœur de Sibylle. Lire les mots pour mieux dire ses sentiments.

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